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Alors c’est ça, la guerre ? Ni courage, ni audace, ni gloire ? Rien d’autre que la terreur et l’explosion des obus qui soulèvent la terre en d’immenses geysers ? La fumée qui asphyxie ? La puanteur des cadavres qui fait vomir ? Les hurlements et les plaintes ? Les poux et les rats ? Les tirs des mitrailleuses qui coupent les corps en deux ? La panique parce qu’on ne sait plus où on est ? Seul dans une nuit blanche d’angoisse, Anzême tente de chanter pour se donner le courage qui lui manque. Mais il est bien court, le temps des cerises… Sauf que ses dents ne font que claquer, sauf que son corps tout entier tremble sous sa capote militaire. Trop de morts, trop de souffrance, trop de saleté, trop de confusion : en quelques jours, il a vieilli de mille ans. Tout ce qu’il croyait a disparu, enseveli sous la poussière. Non, l’armée française n’est pas la plus forte. Elle ne marche pas sur Berlin, elle fait du surplace dans les champs de betteraves. Non, les balles de l’ennemi ne rebondissent pas sur les corps : elles s’y enfoncent. Non, les tranchées n’abritent rien ni personne, mais s’effritent et s’effondrent sous les tirs d’obus. Non, les officiers ne savent pas ce qu’ils font, ils improvisent. »